7 milliards et le monde d’avant
Une importante aide de l’état à notre compagnie vient d’être annoncée à la double condition de responsabilitéenvironnementale et de conditions de rentabilité accrue à moyen terme.
S’agissant de la responsabilité environnementale d’Air France, il faudrait vivre dans l’Ancien Monde pour ne pas lajuger indispensable.
Mais l’injonction de rentabilité (à hauteur de 7,5 %) cache une contradiction flagrante.
Dans ce monde d’avant, nous savons que cette rentabilité à tout prix n’est pas compatible avec les impératifs environnementaux.
Dans ce monde d’avant, nous savons que cette rentabilité à tout prix a interdit toute préparation à affronter une telle crise, tout en augmentant notre vulnérabilité aux conséquences sociales de celle-ci.
Dans ce monde d’avant, nous savons que cette rentabilité à tout prix provoque la casse sociale.
Avant la crise, Air France était rentable, contrairement à la politique libérale qui a mené à la délocalisation de notreindustrie du médicament et des masques de protection, qui a très largement affaibli notre système de santé, etc.
Le ministre de l’Économie, plutôt que d’inciter à faire payer cette crise aux salariés, devrait prioritairement s’attaquer aux missions de service public du transport aérien, les définir et interdire les compagnies flibustières telles Ryanair,Norvwégian et Volotéa, dans une moindre mesure Easy Jet, qui, par leurs pratiques, ne participent ni à notre modèlesocial, ni à notre système de santé ou éducatif.
Le ministre de l’Économie devrait dès maintenant prendre acte que les actionnaires privés du Groupe Air France-KLM ont renoncé à faire vivre et survivre l’entreprise, puisqu’ils sont en défaut de paiement des salaires (pris en charge à 80 %par l’état par le biais de l’activité partielle) et qu’ils ne prévoient pas d’injecter du « cash », contrairement à l’état.
Le ministre de l’Économie devrait veiller à ce que le différentiel de taxes d’exploitation (il ne s’agit pas de cotisations sociales, il ne s’agit pas d’impôt) entre Roissy et
Amsterdam Schiphol soit rééquilibré au plus vite en l’imposant à Paris aéroport (ADP) (près d’un milliard d’eurosannuels).
S’il en avait le courage, Air France serait non seulement rentable d’un point de vue comptable (pas à 7,5 % au bénéficedes actionnaires), mais aussi au sens de l’intérêt général.
Au lieu de cela, il nous propose la destruction de milliers d’emplois, la sous-traitance, et pourquoi pas l’embauche du DRH d’Amazon ou d’Uber pour atteindre cette rentabilité excessive au service de quelques intérêts particuliers.
Le monde d’après doit au contraire redéfinir les politiques de transport, en coordination avec la SNCF entre autres, dans le cadre d’un vrai plan d’aménagement du territoire adapté aux contraintesenvironnementales, et service d’usagers et non de clients, débarrassé des pratiques déloyales.