Citation d’Étienne LICHTENBERGER
L’audience est consacrée intégralement à la citation du directeur de la sécurité d’Air France au moment des faits. Après une longue carrière de pilote commencée en 1970, il finit directeur de la sécurité d’Air France en 2009 avec pour tâche de déployer le Système de Gestion de la Sécurité (SGS ou SMS en anglais). Il part à la retraite en 2013 pour devenir consultant chez Air France Consulting. Il est toujours lié contractuellement à la compagnie, notamment dans le cadre de l’AF447.
ASRs
Après un échange sur les causes de l’accident, la présidente l’interroge sur les ASRs.
M. LICHTENBERGER rappelle que tous les ASRs ont été pris en compte et transmis à la DGAC et à Airbus, même s’ils n’ont pas fait l’objet de réponse individuelle. Il a reçu personnellement le “CDB du Tana” et réfute le fait que certains auraient été éconduits par le service SV. Ses services ont même, pour certains des incidents reportés, prélevés les DFDR pour transmettre encore plus d’informations à Airbus.
Séance E33
Une séance de simulateur avait été mise en place en 2007, avant le début des premiers événements et consistait en quatre exercices : tours de piste, approche à vue, démonstration du GPWS pour se terminer par un départ de Rio avec un problème d’indication de vitesses en dessous de l’altitude de sécurité.
Cet exercice effectué à basse altitude devait permettre un traitement complet de la procédure IAS DOUTEUSE (UNRELIABLE AIRSPEED de l’époque).
Pour M. LICHTENBERGER, elle a permis de répondre ensuite aux problématiques rencontrées par les équipages lors des premiers incidents.
La présidente s’étonne alors qu’une nouvelle séance ait été faite à haute altitude après l’accident.
M. LICHTENBERGER répond que c’était une réaction face à l’émotion, car à ce moment-là nous ne connaissions pas les causes de l’accident.
If the safe conduct of the flight is impacted
M. LICHTENBERGER, dans sa démonstration de la pertinence de l’entraînement à basse altitude, explique que la phrase “safety of the flight is impacted” voulait dire pour Air France :
“vous êtes en dessous de l’altitude sécurité”.
La compagnie avait même cherché à convaincre Airbus que, lors de la perte d’indications de vitesse, la sécurité du vol n’était impactée QUE si l’avion était sous l’altitude de sécurité, pour risque de CFIT.
Au-dessus de l’altitude de sécurité, pas de risque, donc pas de nécessité à appliquer la procédure.
Fin des échanges entre M. LICHTENBERGER et la cour :
- Le vice-président : “STALL c’est un mot terrible. Vous-même vous n’avez jamais vécu de STALL, sauf en simulateur et sur avion léger. Donc, STALL c’est quelque chose d’important et si j’ai bien compris cela n’arrive jamais. Donc je comprends qu’on s’intéresse à pourquoi les pilotes [qui ont subi les incidents n’appliquent pas la procédure]. [..] Mais la question par rapport à ce STALL, c’est qu’Air France est confrontée à une série d’incidents récurrents, où apparaît ce signal STALL ; ce n’est pas banal. Ça apparaît en 2007, 2008, on rattache cela très vite aux pitots. Vous nous expliquez les ASRs, il y a une discussion [avec Airbus]. D’accord. C’est engagé. Mais enfin, compte tenu de [la] récurrence de cette alarme, il faut réagir très vite. Je ne comprends pas que les mois passent. Il n’y avait pas de réponse plus rapide pour faire face à cet événement ?”
- M. LICHTENBERGER : “La réponse était dans la documentation”
- Vice-président : “Cette documentation, tous les pilotes sont censés la connaître, et pour autant, il y a la récurrence. [..] Ma question, ce n’est pas la documentation, c’est la réaction. Pourquoi différents services à Air France n’ont pas essayé de mettre en place tout de suite une réponse rapide face à cette situation, par rapport au STALL, rarissime, qui se produisait en vol, hormis la note de l’OSV ?”.
M. LICHTENBERGER répond sur la mauvaise réaction de pilotage.
- Présidente : “La question ce n’est pas celle-là. Moi je vous le dis, [d’autres] pilotes [avant l’AF447] n’ont pas appliqué [la procédure]. [S’il n’y a pas eu des accidents mais seulement des incidents], c’est au petit bonheur la chance !”.
- M. LICHTENBERGER : “Ils l’ont appliqué, puisqu’ils ont appliqué la procédure”.
- Présidente [sur un ton énervé] : “D’accord c’est votre réponse !”.
Intervention des parties civiles
M. LICHTENBERGER nie avoir été informé des évènements chez Air Caraïbes.
Il est conforté par Airbus qui fait rappeler que les évènements remontés aux OSVs l’étaient de façon anonymisée.
Il défend la “note OSV du 6 novembre”, pourtant jugée insuffisante par nombre d’experts et de pilotes qui ont été amenés à témoigner.
- Pour M. LICHTENBERGER, les événements, y compris avec alarme STALL, n’étaient pas des incidents graves, car les incidences étaient restées dans les normes, y compris pour le “Tana” au cours duquel le pilote avait émis un message MAYDAY pour descendre en urgence. La dépose des DFDR évoqués précédemment revêtait un caractère exceptionnel.
- Question du représentant pilote ALTER : “Vous avez dit que pour la séance E33, la définition d’Air France sur if the safe conduct of the flight is impacted était ‘lorsque l’avion est en dessous de l’altitude de sécurité’. Est-ce que vous confirmez ?”
- M. LICHTENBERGER : “Oui.”
- Question : “Sur le document TU page 143 : VOL AVEC IAS DOUTEUSE ADR CHECK PROC, il est écrit ‘Si la sécurité du vol est affectée (toutes les indications de vitesse sont erronées, ou si l’indication de vitesse fausse ne peut être clairement identifiée)’. [Êtes-vous d’accord que] ce n’est pas du tout la même définition que vous venez de nous confirmer à l’instant sur l’altitude de sécurité ?”
M. LICHTENBERGER demande une suspension d’audience de 10 minutes.
De retour, il indique :
“Je ne sais pas répondre. Il faudrait que je reprenne mes notes.”