Sont cités à la barre Patrick GOUDOU, directeur exécutif de l’EASA en 2009, Pierre BERNARD, directeur technique PN à la DGAC, et Maxime COFFIN, directeur du contrôle et de la sécurité DGAC.
Patrick GOUDOU
Polytechnique 1970, Sup Aéro. Il devient directeur exécutif de l’EASA en 2003 à sa création et y effectue deux mandats de 5 ans.
L’EASA reçoit la 1ère alerte en provenance d’Air Caraïbes, transmise par la DGAC.
Il ressort des questions de la présidente que l’EASA ne pouvait pas imposer une reclassification des risques de chaque panne, mais pouvait émettre une consigne de navigabilité qui ne viendra qu’après l’accident.
M. GOUDOU explique le nombre d’occurrences de défaillances admises en fonction de la criticité :
- 10⁻⁵ pour majeur,
- 10⁻⁷ pour dangereuse,
- 10⁻⁹ pour catastrophique.
Cela veut dire, pour majeur, qu’il fallait rester en deçà de 1 événement pour 100.000 vols.
- M. GOUDOU : “Avant l’accident, compte tenu du nombre de cas et du nombre d’heures de vol, on était largement en dessous des 10⁻⁵. Après l’accident, de nouvelles occurrences antérieures sont remontées et ont été rapportées à Airbus. Comme on risquait de s’approcher des 10⁻⁵, on a émis une CN [consigne de navigabilité] qui demande de mixer entre elles les sondes installées sur les appareils : une Goodrich et deux BA.”
- La présidente : “Donc on a considéré à ce moment-là qu’il était prudent par précaution de mettre des sondes Goodrich ?”
- M. GOUDOU : “Oui.”
- Maître KOUBBI (avocat des familles de victimes) : “C’était classé majeur sous réserve d’un entraînement adéquat ?”
- M. GOUDOU : “Lors des réunions, on n’a pas vu le besoin de lancer quoi que ce soit sur la formation.”
- Maître HOCQUET (avocate du SNPL) : “Comment avez-vous fait le test de la procédure IAS DOUTEUSE ?”
- M. GOUDOU : “Qu’au simulateur.”
- Maître HOCQUET : “Donc on attend 10⁻⁵ ?”
- M. GOUDOU : “Si, on a agi avant [les 10⁻⁵].”
- Maître HOCQUET : “Mais après [l’accident].”
- Maître PETIT (avocat d’ALTER) : “On a l’impression que ce n’est pas l’accident qui a déclenché la CN, mais l’occurrence des pannes ?”
- M. GOUDOU : “Vous avez parfaitement raison, ce n’est pas l’accident qui a déclenché la CN. Mais avec l’accumulation des événements on approchait 10⁻⁵.”
- Intervention du représentant ALTER : “Si l’on ne s’était pas approché des fameux 10⁻⁵, est-ce qu’il aurait fallu avoir deux accidents pour que l’EASA publie une CN ?”
Le représentant ALTER fait ressortir qu’aucun Safety Information Bulletin n’a été publié avant l’accident, et que celui sorti après l’accident avait uniquement pour vocation à confirmer la navigabilité de l’A330 :
“We confirm that the AIRBUS A330 type and all other AIRBUS aircraft types are airworthy and safe to operate.”
Pierre BERNARD et Maxime COFFIN
La présidente lit l’audition précédente de M. COFFIN où il apparaît que la base ECCAIRS était difficilement exploitable et que tout reposait sur l’humain pour détecter des signaux faibles.
Elle fait part de sa surprise face au décalage entre la performance de l’aviation civile et le côté archaïque de la base ECCAIRS.
L’email de François FRANÇON, CDB Air France et OCV, qui alerte sur les événements d’Air Caraïbes, est évoqué.
Il s’ensuit un long échange sur la réaction de la compagnie et la lenteur de la réponse de l’EASA.
La sœur d’un passager décédé intervient avec l’autorisation de la présidente.
Elle fait ressortir le décalage entre le traitement froid, clinique de la DGAC et le manque d’investissement personnel, humain, de la part de M. COFFIN, et lui demande pourquoi il n’a pas “creusé” pour avoir “des éléments”.
Elle termine son intervention par ces mots :
“Si chacun avait fait un tout petit peu quelque chose, on n’en serait pas là.
Qu’avez-vous fait au sein de la DGAC, qu’avez-vous fait ?”
Monsieur COFFIN, empreint d’émotion, s’excuse :
“Je suis peut-être passé à côté de la gravité de ce que vous voulez dire. (…)
Notre système est imparfait, entre autres parce que nous sommes des hommes et des femmes.”