En 2014, les pilotes d’Air France se sont mobilisés 14 jours durant pour revendiquer un contrat commun entre les pilotes d’Air France et ceux de Transavia France. Àl’issue du conflit, la direction a obtenu le déplafonnement de la flotte de Transavia de 14 à 40 avions, en échange de quoi les pilotes d’Air France s’assuraient d’être aux commandes des 26 avions supplémentaires autorisés. Mais toujours pas de contrat commun à ce stade… Il faudra attendre le déplafonnement total de la flotte de Transavia et l’abandon d’Orly par Air France pour s’en rapprocher.

La genèse
Dès décembre 2013, puis lors de la campagne pour le Conseil d’administration du groupe Air France en mars 2014, ALTER défend l’idée d’un contrat unique pour tous les pilotes du Groupe.
Cette proposition visait à :
– unifier la Liste de Classement Pilote (LCP),
– mettre en place la prime de vol à l’ancienneté,
– fluidifier la mobilité interne entre Air France, Transavia et HOP !,
– mettre fin au dumping interne et renforcer la cohésion sociale.
Nos arguments ont toujours cours :
« Air France, Transavia, HOP, trois entités d’un même groupe, et pourtant…
Et pourtant ces trois entreprises ne trouvent pas la complémentarité nécessaire au développement de chacune d’elle.
La direction décide, et les pilotes de ces trois compagnies subissent…
… Pour en finir avec cette gabegie, il n’existe qu’une voie, c’est celle de l’unification de tous les pilotes du groupe. Cette unification passe par des transformations techniques de nos accords, la mise en place d’une LCP commune et, pour que cette LCP commune ne soit pas le terreau d’une nouvelle guerre, la mise en place d’une paie à l’ancienneté, seul système qui déconnecte la paie d’un pilote de celle de son voisin, ainsi qu’une harmonisation des conditions d’emploi. »
Le conflit
14 jours de grève unitaire en septembre 2014 pour une revendication unique et claire : un contrat de travail commun pour Transavia France et Air France.
La grève, l’une des plus longues de l’histoire d’Air France, est l’expression d’une vision commune : défendre un modèle social intégré, protéger l’avenir des pilotes, et éviter la fragmentation organisée par la direction.
En plein conflit, Alexandre de Juniac (alors directeur général de la Holding AF-KLM) joue la provocation et annonce la création de Transavia Europe (contrats pilotes sous statuts locaux). À défaut d’aboutir dans sa volonté, le chiffon rouge aura fait son office de diversion puisque le SNPL met fin au conflit contre l’abandon de ce projet, sans avoir obtenu satisfaction sur la revendication commune, en autorisant Transavia France à « grossir » jusque 40 avions.
L’accord qui en résultat prévoyait la création d’un groupe de pilotes unique, mais sans contrat de travail unique.
Concrètement :
• Les pilotes volontaires pour Transavia France signent une convention de détachement.
• Ils conservent leur contrat Air France (suspendu temporairement), leur séniorité, leur retraite, etc.
• Ils sont soumis aux conditions d’utilisation et de rémunération de Transavia France, ce qui implique plus d’heures de vol pour un salaire équivalent.
• Une prime de détachement est mise en place.
Le 17 octobre 2014, le Monde titre : « Accord chez Air France : avantage à la direction face aux pilotes. Un projet d’accord a été conclu jeudi soir. Les pilotes n’ont pas obtenu le contrat unique, englobant Air France et Transavia, la filiale low cost, qui était leur principale revendication. »
Un objectif trop vite abandonné !
Le SNPL était convaincu du bien-fondé du contrat unique. Il publie pendant le conflit un document complet (Document de présentation pour la mise en œuvre d’une stratégie de développement de Transavia France) qui valide la clé de voute d’une stratégie viable qu’ALTER avait présentée un an auparavant :
« Considérer l’ensemble Air France-Transavia France comme une entité unique du point de vue périmètre, nécessite de le considérer également comme une entité unique du point de vue du contrat des pilotes de ligne concernés. En effet, si des contrats dissociés devaient perdurer, la mise en concurrence des deux groupes de pilotes serait inévitable et explosive, tant sur le plan des conditions d’emploi que sur le volume d’emploi, et donc perturberait la sérénité du dialogue social.
Selon la direction, une réponse possible serait un “Accord de Groupe” catégoriel pilote.
Au-delà de l’instabilité juridique actuelle de la constitution d’un tel accord, de nombreuses questions restent aujourd’hui sans réponses…
… Nous avons parfois entendu que : “Faire de Transavia France une compagnie sans avion et sans pilote reviendrait à tuer Transavia France” ou encore “Imposer des avions de la famille A320 à Transavia France alors que Transavia Europe exploitera des B737 revient à tuer toute synergie entre Transavia France et Transavia Europe”.
Le SNPL Air France ALPA réfute ces scénarii catastrophes…
… En se basant sur la clientèle, sur ses évolutions, le SNPL Air France ALPA estime incontournable la création d’un groupe unique de pilotes, sous contrat Air France, exerçant sur un seul type avion de plus de 110 places pour l’ensemble des marques du groupe.
Cette solution apporte souplesse et agilité dans l’attribution des marques commerciales, robustesse et optimisation de l’exploitation et enfin des coûts connus et maîtrisés. »
Ce sont les mêmes qui, depuis, ont mis en place l’accord de Groupe, abandonné l’idée du contrat unique pilote Air France pour toutes et tous, accepté l’abandon d’Orly par Air France qui supprime toute agilité et souplesse dans notre exploitation.
HOP ! oubliée: une erreur stratégique majeure.
Aujourd’hui comme en 2014, les pilotes de HOP! n’acceptent pas d’être la variable d’ajustement d’un groupe aérien alors même qu’ils savent que leur activité peut se développer et que l’activité qu’ils produisent est un maillon essentiel du réseau Air France.
ALTER, au moment de la grève, acceptait de différer certaines de ses propositions concernant HOP!, d’avancer pas à pas, d’autant que le SNPL Air France n’était pas favorable à se préoccuper des pilotes de HOP !
Le rapport de force, qui était favorable aux pilotes pendant la grève, a complètement changé après la signature de fin de conflit du SNPL. Alexandre de Juniac a repris la main avec ses ambitions de casse sociale et son projet « Perform 2020 » qui prévoyait 20 % d’économies sur la masse salariale sous couvert de chantage aux licenciements. De 2014 à 2018, les conflits se sont enchainés, centrés sur Air France, faisant oublier -à tort-, l’avenir de la troisième entité du Groupe.
Benjamin Smith est donc arrivé avec un boulevard social devant lui : les pilotes étaient usés et n’aspiraient qu’à la paix sociale. Quelques augmentations bien survendues lui ont permis de mettre en place un triptyque aussi implacable que dangereux :
• Abandon du domestique par Air France pour offrir les créneaux Orly à Transavia France ;
• Abandon programmé de la flotte Airbus 320 Air France au profit d’un plus petit module, l’A220 ;
• Diminution de moitié de la flotte HOP ! et de nombreuses bases régionales.
L’ensemble de ces choix a eu UNE et UNE seule conséquence :
Volotea est désormais la première compagnie sur le réseau domestique !
L’emploi et la qualité du contrat associé étaient au cœur des revendications de l’historique grève de septembre 2014. Cet objectif reste primordial et concerne plus que jamais les pilotes de HOP!, l’avenir de leur compagnie, et la nécessité de contrer la monopolisation du réseau domestique par Volotea.
Air France abandonne Orly ce qui ne concourt pas à cette stratégie.
Transavia ne veut que les créneaux d’Orly, mais ne s’intéresse pas aux lignes domestiques
HOP ! a été mise au régime sec (moins de 40 avions) et ferme ses bases.

Pour contrer les low cost, Volotea en particulier, sur le réseau domestique, il faut impérativement que Benjamin Smith change TOUTE sa stratégie concernant le moyen-courrier. C’est le sens de la lettre ouverte que nous avons transmise au ministre des Transports (à retrouver sur notre fil Telegram).