Le SGRF (système de gestion du risque fatigue) est une instance indispensable à la Sécurité des Vols.
Les outils utilisés doivent être à la hauteur de ces enjeux.
Sont-ils fiables ?
Rien n’est moins sûr.
L’outil SAFTE FAST anticipe les capacités de repos des équipages, en vol ou en escale. Son paramétrage est à la main de la DGSV (Direction Générale de la Sécurité des Vols).
L’actimétrie (mesure réelle du sommeil par port d’une montre-bracelet dédiée) est mise en place à la demande du comité RF (risque fatigue), sur la base des demandes des représentants pilotes. C’est au forceps qu’ils l’imposent, car la direction semble se satisfaire d’indicateurs dont l’analyse reste subjective : « les résultats comparés aux mois précédents et aux mêmes mois des années précédentes démontrent une baisse des PR RF et des niveaux de fatigue grâce à la robustesse des rotations en exploitation (respect des softs rules en exploitation, baisse des prises de marge et des demandes d’OPL SUP). »
Il est donc facile d’affirmer, dans ces conditions et sous couvert d’un modèle mathématique : « ça passe crème ! ».
Dans le monde réel, si l’on prend l’exemple de Bogota, l’actimétrie démontre que l’outil SAFTE FAST est mal paramétré :
« La durée de sommeil en escale relevée par l’actimétrie est inférieure aux prédictions dans SAFTE FAST. En 51 heures de repos en escale, le sommeil est réparti en trois périodes de repos.
1 : Nuit à l’arrivée du vol aller : les pilotes dorment 1 h 58 de moins que la prévision de 8 h 40 de SAFTE FAST.
2 : La nuit avant le vol retour : les pilotes dorment 2 h 33 de moins que la prévision de 9 h dans SAFTE FAST.
3 : La sieste avant vol : Les pilotes dorment 36 minutes de moins que les 2 h 30 prévues dans SAFTE FAST.
Dette de sommeil : 5 h 07 en 51 h. »
Sur Atlanta, l’actimétrie démontre une dette de sommeil de 4 h 40 en 49H10.
Sur San José, l’actimétrie démontre une dette de sommeil de 5 h 46 en 48h35.
ALTER a demandé des mesures d’actimétrie sur Cancún et Mexico (les rotations sont similaires) pour pouvoir vérifier l’influence de l’altitude sur la qualité du sommeil.
Ces relevés d’actimétrie ont permis la mise en place de mesures d’atténuation du risque fatigue (détente de la rotation, OPL sup…).
L’objet de notre propos, avec ces exemples, est de démontrer que l’utilisation de SAFTE FAST mal paramétré, combinée à un auto satisfecit sur la baisse du nombre de PR fatigue (possiblement par lassitude des pilotes), ne suffit pas à mener une réelle politique de diminution de la fatigue, de garantie de la Sécurité des Vols.
Vos représentants font le « job », mais ce « job » devrait, en théorie, être également partagé par la DGSV. Ce n’est malheureusement pas le cas.
La fatigue, c’est factuel. Nous devons lutter contre l’envie de modéliser un outil de mesure en fonction du résultat que l’on souhaite obtenir (faire passer la ligne et la déclarer non fatigante). Chaque pilote doit se saisir du retour d’expérience proposé (PR fatigue), même si le verbatim est culpabilisant (qui ose écrire « complètement fatigué, incapable de travailler efficacement », c’est-à-dire d’avouer être en faute au regard de la réglementation ?).
Ayons pourtant conscience que seuls les PR fatigue de niveau supérieur ou égal à 6 sont pris en compte.