Devenir TRI - Expérience exigée !

Quand la direction nous convoque à une négociation, la première des précautions que nous prenons concerne l’impact sur la Sécurité des vols. Nous faisons de même à chacune de nos propositions d’amélioration du contrat social. Notre méthodologie reste simple, elle est une garantie de ne pas nous fourvoyer : nous respectons une matrice de priorité, à savoir, dans l’ordre, Sécurité des Vols, santé, sûreté, QVT, emploi, salaires.

La direction souhaiterait modifier le protocole instructeur. La règle « un an de ligne pure » entre deux mandats ne s’appliquerait plus aux TRI OPL devenant CDB A220. Seule subsisterait la sortie du statut J (150 HDV, 75 étapes sur A220).

Cette règle est une règle de carrière et, dans une moindre mesure, une règle de Sécurité des Vols (en particulier quand les deux mandats se font sur le même type avion, les négociateurs ont jugé bon qu’un instructeur redevienne 100 % pendant un an, histoire de prendre du recul).

Soyons transparent, il est aujourd’hui possible à un jeune CDB de postuler instructeur dès sa sortie du statut J, dès lors qu’il n’est pas contraint pas la règle de carrière inscrite dans l’accord. C’est une anomalie qui nous semble très grave en termes de Sécurité des Vols, qui heureusement, de mémoire syndicale, ne s’est jamais produite (aucun volontariat TRI enregistré avant un an de lâcher).La direction, par sa proposition, nous offre donc l’opportunité de corriger cette anomalie et d’instaurer un socle d’expérience avant de pourvoir postuler TRI.

Pourquoi ce socle d’un an ?

 « La validation (NDLR d’une candidature à la fonction instructeur) s’appuie sur l’étude du dossier professionnelle et les remontées managériales ».

Ce n’est pas ALTER qui l’écrit, c’est la DGOA dans son Manex D.

Cette validation est-elle réalisable avant 12 mois de lâcher en ligne, et au minimum deux cycles ECP? nous pensons que non.

Les compétences instructeurs requises en fin de formation sont : Communication, diagnostic, traitement, connaissances Implication, facilitation, adaptabilité.

Certaines de ces compétences relèvent du « savoir être », elles sont consolidées pendant la formation instructeur.

D’autres relèvent du « savoir-faire » et sont enseignées lors du stage pédago.

Quand il s’agit de « nouveaux savoirs », le travail personnel peut s’avérer considérable.

Concentrons-nous sur la compétence connaissance :

·     Bonne connaissance du traitement administratif de l’acte.

·     Bonne connaissance de la feuille de notation

·     Bonne connaissance des outils pédagogiques.

Le stage pédago est là pour rendre capable, il remplit ce rôle d’apprentissage de ces connaissances.

D’autres connaissances relèvent de l’expérience :

·     Bonne connaissance opérationnelles et techniques : Qui peut nier que l’expérience de la ligne et de la fonction est un des éléments clé de cette connaissance ?

Enfin, les dernières compétences exigées d’un instructeur relèvent du travail personnel :

·     Bonne connaissance des référentiels instruction (le Manex D en fait partie, il fait plus de 500 pages, une trentaine étant indispensables à l’exercice de l’instruction).

·     Bonne connaissance des compétences pilotes, des modèles TEM et FH :

Les compétences FH pilotes sont au nombre de 17, une paille à maîtriser ! Les compétences FH instructeurs sont au nombre de 7 : connaissance de soi, stress et performance, erreur et apprentissage, erreur et résilience, estime et ego, le discours interne, explicitation et auto-explicitation. Elles nécessitent un degré d’étude colossal pour en comprendre tous les ressorts.

Quels risques sans ce socle ?

On ne pourra être exhaustif tant ces risques vont varier d’un pilote à l’autre.

Néanmoins, ce que nous dénonçons de manière ferme, c’est l’impact d’un nouvel apprentissage alors que le précédant n’est pas consolidé (scientifiquement nommé interférence rétroactive).

Diverses études et publications scientifiques font référence à :

·    L’interférence sur la consolidation du savoir provoquée par un nouvel apprentissage (Marcus Vinicius Costa Alves, de l’université de Sao Paulo, 2017),

·    Une dégradation des souvenirs précédant par la modification des circuits thamalo-corticaux provoquée par un nouvel apprentissage (Modèle de consolidation stochastique, Scientific Report, 2022),

·    Un second apprentissage pendant la fenêtre de consolidation du premier, réduit fortement la rétention du premier en 24 h (modèle Lymneaea, 2019).

Acquérir un savoir sans consolider le savoir précédant le mets en danger. La consolidation nécessite du temps.

Combien de temps ? Un an minimum nous paraît raisonnable.

Revenons aux fondamentaux et interrogeons-nous sur l’impact Sécurité des Vols de l’accord proposé par la direction. C’est le sens du message que nous avons passé au bureau du SNPL qui était prêt à accepter le deal sur les TRI A220 CDB inexpérimentés contre… la création des vols couples pilote pour les instructeurs.